Orateur(s)
Sébastien Doutreloup Assistant de recherche et d’enseignement (Dpt. de Géographie, Climatologie et Topoclimatologie, ULiège)
Shady Attia Professeur (Dpt. ArGEnCO, Techniques de construction des bâtiments, ULiège)
Mathieu Leroy Ingénieur de projets (Bureau Greisch)

Les bâtiments à l’épreuve du climat. Impact et principes de résilience

Résumé

La rencontre-conférence de ce midi réunissait 3 intervenants aux approches et backgrounds complémentaires pour aborder une thématique bien d’actualité : l’impact du changement climatique sur le bâti.

Alors que nous avons déjà traité à plusieurs reprises de la rénovation énergétique des bâtiments, nous proposions, ce midi, un autre angle de vue en nous intéressant à la résilience des bâtiments ou, autrement dit, à la capacité à les adapter pour qu’ils résistent aux contraintes climatiques de plus en plus nombreuses, diverses et prégnantes.

Afin de poser la réflexion, Sébastien Doutreloup (Assistant de Recherche et d’Enseignement, Dpt. de Géographie, Climatologie et Topoclimatologie, ULiège) a d’abord objectivé ces contraintes en partageant des scénarios météorologiques futurs.

Il a débuté son exposé en reprenant 3 conclusions du GIEC :

  • Ce sont bien les activités humaines qui sont responsables du réchauffement climatique ;
  • Le changement climatique devient de plus en plus répandu, rapide et intense ;
  • Chaque décade est de plus en plus chaude.

Ensuite, carte à l’appui, il a montré l’évolution de la température et l’augmentation des événements extrêmes (canicules ou précipitations).
Après ces observations, il a partagé quelques projections en faisant notamment le focus sur des simulations réalisées en Belgique. Pointant que, par rapport aux projections du GIEC, nous sommes exactement sur la courbe du scénario le plus réchauffant, il avertit que, sans réduction des EGS, nous gagnerions 6 degrés (par rapport à la période 1850-1900). Avec augmentation du nombre de nuits tropicales et de jours de canicules…

Cette introduction a permis de mettre en avant la nécessité de s’adapter désormais aux changements climatiques. Comme le dira plus tard Shady Attia (voir plus bas), il y a lieu de s’intéresser aux « chocs ».
Sébastien Doutreloup a terminé sa présentation en évoquant le projet OCCuPaNt dans le cadre duquel son laboratoire réalise notamment des sets de données climatiques en lien avec les futurs scénarios. Ceci en utilisant le MAR (Modèle Régional du Climat) qui présente l’avantage d’être calibré sur la Belgique et de permettre une meilleure identification des phénomènes locaux.

Mathieu Leroy (Ingénieur de projets au Bureau Greisch) est intervenu à la suite de cette introduction climatique pour mettre en évidence dans quelle mesure ces changements influencent le travail d’un bureau d’étude, comme Greisch.

Rappelant que le bâtiment représente 40% de l’impact environnemental global, Mathieu Leroy a partagé sa conviction relative à la nécessité de changer de paradigme.
Il a introduit la notion de « résilience » : comment le bâtiment intègre le risque et s’adapte dans la durée. Une notion qui entre désormais en compte dans les certifications environnementales des bâtiments, renvoyant à des normes de résistance et d’adaptabilité.

L’Europe insiste sur 3 types de mesures pour adapter les bâtiments :

  • La mesure verte qui renvoie à la « nature » ;
  • La mesure grise qui renvoie aux technologies ;
  • Et les mesures douces qui concernent des changements de norme de confort notamment.

Il a ensuite parcouru une série de risques qui sont autant de défis pour concevoir le bâti demain : les risques physiques (confort thermique, sécheresse, inondation, îlots de chaleur urbains, gestion intégrée des eaux fluviales), les risques de transition (pénurie des matériaux) et les risques sociaux (agents pathogènes)…

Pour clôturer sa présentation qui fut une invitation à faire évoluer tout le secteur de la construction (à travers une réflexion liée à la circularité des matériaux), il a présenté un modèle de maison « sobre » en tant que source d’inspiration (avec ventilation naturelle, isolation en liège, usage de matériaux de récupération et récupération d’eau de pluie...). Une invitation à la créativité face à toutes ces contraintes !

Enfin, Shady Attia, Professeur (Dpt. ArGEnCO, Techniques de construction des bâtiments, ULiège) est lui aussi revenu sur la notion de résilience qu’il distingue de la robustesse et de la résistance.
Il y a lieu, selon lui, de dépasser la volonté d’atténuer le réchauffement climatique et de réagir face aux chocs qui en sont une conséquence directe et palpable.
Exemples à l’appui (issus d’étés récemment connus), il a montré la corrélation entre l’augmentation du taux de mortalité et le réchauffement des températures.
Avec son laboratoire, il caractérise les bâtiments pour essayer de comprendre ceux qui seront les plus vulnérables (ses travaux reposent surtout sur les « résidentiels » mais aussi les maisons de soin).

Devant les risques que subissent les bâtiments tertiaires : la demande de refroidissement augmente. Il faut préparer notre infrastructure en conséquence.

Enfin, il a livré sa vision prospective de la maison en 2050 avant de conclure en signalant que son laboratoire S’LAB intègre un nouvel indicateur de résilience dans le PEB wallon pour la conception et la rénovation de bâtiments à l'épreuve du climat.