La précarité énergétique, un reflet des inégalités sociales
Résumé
Sébastien Brunet, Administrateur Général de l’IWEPS, a démarré la conférence en évoquant la situation de la pauvreté en Wallonie. La pauvreté en Wallonie peut se mesurer avec divers indicateurs. Le taux de risque de pauvreté relate que 15.3% de la population soit, 550.000 personnes sont en situation de pauvreté en Wallonie en 2023. Parmi elles, 80 000 personnes bénéficient de l’aide sociale. Si on fait un focus sur Liège, 1 jeune (18-24 ans) sur 5 bénéficie d’un revenu d’intégration sociale. La pauvreté est très majoritairement durable et rarement passagère. En Wallonie, entre 8 et 9 personnes vivant dans la précarité sur 10, sont dans une situation de pauvreté persistante. De plus, 16.9% des personnes vivent dans un logement qui présente un problème d’humidité soit 608 000 personnes.
Pierre Dewallef, Professeur à la Faculté des Sciences Appliquées, Aérospatiale et Mécanique d’ULiège, a démarré sa présentation en nous démontrant que la précarité énergétique était le reflet des inégalités sociales. Par conséquent, il est important de travailler l’accès à l’énergie pour tous.
En pratique, les données montre que les prix de l’énergie sont constants/stables dans le temps. De 1990 à 2021, la consommation totale d’énergie finale des logements en Wallonie est pratiquement constante (-1,6% selon l’IWEPS). Le problème du coût de l’énergie provient essentiellement des crises énergétiques. Une des questions qui se pose alors est : comment économiser son énergie ? Trois réponses sont possibles. Premièrement, on peut consommer moins (énergie utile) : 1° degré de moins au thermostat représente une économie de 6% d’énergie. Deuxièmement, consommer mieux (énergie finale) : efficacité énergétique (isolation, meilleure chaudière, meilleure régulation, …). Troisièmement, consommer autrement (énergie primaire) : renouvelable, électrification du chauffage, biomasse,...
Le deuxième et le troisième point nécessitent des financements importants dont les familles précarisées ne disposent pas. Pour éviter la précarisation liée au prix de l’énergie, il faut éviter de dépendre des crises énergétiques en réalisant notamment des investissements conséquents qui permettront à terme d’absorber les fluctuations de prix et d'être plus résilient par rapport aux crises énergétiques.
Le professeur a conclu en signalant qu’il était possible de diminuer notre dépendance aux combustibles fossiles mais cela demande des investissements importants sur le long terme. Les pouvoirs publics sont des intervenants indispensables dans ces choix de société à long terme, pour garantir un accès à l’énergie pour tous.
Aurélie Lamalle, Tutrice Énergie au sein du Service Énergie Pepi'Watt du CPAS de Pepinster, a démarré son intervention en nous partageant les missions des tuteurs d’énergie – CPAS avec notamment l’aide aux citoyens pour trouver des solutions concrètes afin de réduire les consommations d’énergie des citoyens. Le constat est que l’énergie n’est pas du tout une priorité des ménages précarisés. Bien évidemment, les configurations des logements (immeuble à appartements, villa 4 façades, règlement PEB) influencent les consommations d’énergie des ménages et donc la précarité énergétique. Le tuteur bénéficie d’outils et d’aides tels que le Plan d’Actions de Prévention en matière d’Energie, la prime Mebar II, les compteurs à budget, le prêt à % crédit social … , pour aider les familles précarisées. La gestion de l’énergie devient de plus en plus compliquée, en termes de compréhension et d’usage. Cependant, un fossé se creuse tout de même entre les riches propriétaires qui améliorent et investissent au fur et à mesure dans leur maison et les locataires à revenus précaires qui n’ont pas accès à un logement performant et qui subissent la hausse des prix des loyers de manière fulgurante. Notons que la différence de revenus entre ceux qui bénéficient du tarif social et ceux qui n’y ont pas droit est parfois minime.
Annonce
La précarité énergétique recouvre l'incapacité d'un ménage à se chauffer correctement ou d'assurer ses besoins énergétiques de base. Loin d'être un simple problème technique, elle est intimement liée aux inégalités sociales.
En effet, les ménages les plus modestes sont les plus exposés à cette situation, en raison de revenus insuffisants pour couvrir les dépenses énergétiques, mais aussi du fait qu'ils occupent souvent des logements anciens, moins bien isolés et donc plus énergivores.
Cette situation a de multiples conséquences : problèmes de santé liés au froid, difficultés à mener une vie normale (télétravail, études...), impact sur le pouvoir d'achat global des ménages concernés... Elle révèle ainsi des inégalités profondes en matière d'accès à un confort de base, essentiel au bien-être de chacun.
Les enjeux sont donc multiples : santé publique, lutte contre la pauvreté, transition énergétique, logement. Il est urgent de mettre en place des politiques publiques ambitieuses pour améliorer l'efficacité énergétique des logements, soutenir les ménages les plus vulnérables et accompagner la transition vers un modèle énergétique plus juste et durable. La précarité énergétique n'est pas une fatalité, mais bien le résultat de choix de société.
Sébastien Brunet fera le bilan de la pauvreté en Wallonie pour introduire le constat de précarité énergétique. Pierre Dewallef nous expliquera ensuite les solutions techniques qui s'offrent à nous pour y remédier, et Aurélie Lamalle nous partagera son expérience de terrain pour comprendre les causes de surconsommation des ménages et les aider à les réduire.