Les essais cryogéniques, un enjeu clé pour l'industrie

Cette conférence s’articulait autour des compétences de la spin-off BEBLUE Cryotech qui se positionne, aujourd’hui, comme fournisseur stratégique de tests cryogéniques en Europe et dont les marchés cibles sont actuellement l’espace et la mobilité verte (filière hydrogène).

Marc Duquenne, CEO chez BEBLUE Cryotech, a introduit la rencontre en donnant quelques clés pour comprendre le métier, dont la définition des concepts suivants : la tribologie (étude des phénomènes susceptibles de se produire entre deux systèmes matériels en contact, immobiles ou animés), la cryogénie (étude et production des très basses températures) , les fluides cryogéniques (ayant un point d’ébullition inférieur à 150°C à pression atmosphérique), l’échelle de maturité d’une technologie « TRL », la classification des essais en 5 types.

Il a ensuite présenté les essais cryogéniques et leurs enjeux avant de brosser un historique des activités du laboratoire « groupe CRYO » de l’ULiège qui s’est spécialisé, fin des années 80, dans la résolution de problèmes pointus apparus sur des composants ou des équipements de moteurs cryotechniques. Les 3 types d’activités suivants ont été détaillés : test d’équipements, test de composants, caractérisation de matériaux.

BEBLUE a été créée, en janvier 2022, pour maintenir les moyens d’essais existants et assurer le transfert de l’expertise et des compétences acquises par le laboratoire depuis 30 ans. La spin-off se positionne comme spécialiste des moyens d’essais cryotechniques dans le domaine du spatial où elle est un fournisseur stratégique de solutions d’essai. Un deuxième volet des activités de BEBLUE est d’utiliser les compétences développées dans le spatial pour les mettre au service d’autres développements.

BEBLUE offre un large spectre d’expertises et de moyens d’essais : caractérisation de matériaux, test de composants et systèmes, engineering et expertise. Aussi, la valeur ajoutée de la spin-off est d’évoluer dans un écosystème reposant sur les centres de recherche , les universités et les industriels pour offrir, de manière complémentaire à l’existant, le meilleur service à ses clients.

Jérôme d'Agruma, Co-Fondateur et Sales Officer chez BEBLUE Cryotech, a ensuite expliqué que l’hydrogène est un marché en évolution constante. La demande est de plus en plus grande et tous les secteurs sont en train d’évoluer. Aussi, les secteurs des transports « lourds » et de l’industrie lourde s’avèrent être ceux qui auront le plus besoin d’hydrogène et attirent de nouveaux acteurs. Or, ces derniers n’ont pas/que peu d’expérience en cryotechnique ce qui implique une refonte complète des connaissances dans des domaines tels que les matériaux, la fiabilité, les coûts, l’architecture et les systèmes compatibles, les normes et la sécurité.

Aujourd’hui chez BEBLUE, on travaille essentiellement sur 3 domaines : les réservoirs de nouvelle génération ; les vannes, échangeurs et composants spécifiques ; les piles à combustibles. Notons aussi l’apport en expertise et le travail sur les certifications…

Jérôme d'Agruma a conclu sa présentation en rappelant que le travail de BEBLUE est orienté moyens d’essais et essais dans le domaine de l’hydrogène pour aider les entreprises à développer leurs activités (pas le travail d’un centre de recherche).

Après une brève présentation de l’entreprise Safran Aero Boosters (SAB), partenaire technologique des motoristes de l’aéronautique et du spatial, Olivier De Vriendt, Responsable Projets et Incubation au sein de la Direction de l’Innovation, a expliqué les enjeux de l’aviation verte à l’horizon 2030-2050.

Les mesures concrètes pour le verdissement de la flotte aérienne en vue d’atteindre l’objectif de zéro émission nette de CO2 à l’horizon 2050 sont fixées dans une feuille de route européenne.
On a déjà réduit de 80% la consommation de l’aéronautique par rapport au début de l’aviation commerciale. Pour l’avenir, l’objectif est double. La première étape, bas carbone, est de « sauter une génération » pour arriver à des avions ultra efficaces et plus frugaux, capables d’embarquer des carburants alternatifs. Dans ce cadre, SAB travaille sur des moteurs non carénés. La deuxième étape, zéro émission, est d’arriver à 100% de carburant synthétique vert et d’aboutir à la création de l’avion du futur. Pour ce faire, il faudra adapter le moteur à une combustion à hydrogène.

Il a ensuite abordé les scénarios de décarbonation de l’aérien. Parmi les différents axes de travail de l’aéronautique, citons les améliorations technologiques (ultra-frugalité), l’air traffic management, les sustainable aviation fuels (SAF) et les mécanismes de compensation.
L’engagement des parties prenantes européennes, sur toute la gamme de la flotte aéronautique, a également été évoqué.

Au vu des défis technologiques de l’avion à hydrogène, il y a un grand intérêt à mettre en place une première application court courrier pour 2035. Ces défis concernent le stockage cryogénique nécessitant des réservoirs beaucoup plus grands que le kérosène, le système d’alimentation complexe du carburant, la disponibilité des infrastructures, la disponibilité de l’hydrogène et son prix.

Olivier De Vriendt a ensuite présenté quelques programmes lancés pour supporter cette démarche de décarbonation de l’aviation ;

• ZEROe, lancé en septembre 2020 par AIRBUS, visant le premier avion commercial zéro émission pour 2035 (3 concepts) ;
• CFM RISE (Revolutionary Innovation for Sustainable Engines), lancé en juin 2021 par GE Aviation et Safran, ayant pour objectif de réduire de plus de 20 % la consommation de carburant et les émissions de CO2 par rapport aux moteurs actuels.

Il a souligné que la technologie développée par SAB a un potentiel pour cette architecture et que la sélection, en février 2022, de CFM international est un jalon important pour le programme de démonstration.

Enfin, il a présenté le positionnement de SAB sur l’avion à hydrogène. Quand AIRBUS a annoncé sa volonté de commercialiser des avions zéro émission, Safran s’est embarqué dans l’aventure, avec des innovations qui étaient conçues pour le spatial et pas l’aviation. Ainsi, le projet wallon de faisabilité HYPSTER a été lancé en juin dernier, en partenariat avec Be Blue, ULiège, Sirris, V2i, Gotech... pour évaluer le potentiel de technologies spatiales adaptées à
l’aéronautique. Au niveau européen, citons également le projet Clean aviation de démonstration technologique au sol et en vol et le projet HYDEA.

Olivier De Vriendt a conclu son intervention en expliquant le positionnement de SAB sur 4 lignes de produits : les vannes cryogéniques, les vannes de dosage, les échangeurs hydrogène, et les bancs d’essais moteurs.