Imprimer de l'os en 3D : de la matière au patient
Résumé
Cette rencontre avait pour double objectif de mettre en évidence la collaboration fructueuse entre le groupe de recherche universitaire ULiège-GreenMAT et la PME wallonne Cerhum, dans le cadre du projet PowdPrint et de mettre exergue la plus-value de l'ingénierie des poudres au service de l'industrie biopharmaceutique.
Frédéric Boschini, responsable R&D poudres au sein du laboratoire GreenMAT-ULiège, a démarré la rencontre par un rappel de la triple composition du tissu osseux (50 à 70% de hydroxyapatite, 20 à 40% de matrice organique et 5 à 15% d’eau) et de ses 3 rôles (mécanique, fonctionnel, métabolique), pour illustrer que l’os est un biomatériaux composite de très haute complexité et difficile à reproduire actuellement.
De ce fait, les stratégies de réparation osseuse consistent donc à ne pas remplacer l’os ou, lorsque l’on est face à une déficience osseuse, à procéder à l’autogreffe de l’os du patient lui-même, avec les nombreux inconvénients que cela sous-tend... d’où l’idéal de développer des implants osseux de synthèse personnalisables.
Frédéric Boschini a parcouru les propriétés nécessaires des implants (le « cahier des charges ») avant de lister les matériaux à disposition sur le marché actuellement : implants métalliques principalement (inconvénient : relargage partiel des métaux dans l’organisme), les biomatériaux, dont le zircone (en dentisterie) et l’hydroxyapatite (reconstruction osseuse) qui sont le nec plus ultra.
Il a détaillé les propriétés de l’hydroxyapatite HAP vs celles du phosphate tricalcique (TCP) avant d’expliquer les trois étapes du procédé d’impression 3D du métal (la modélisation & le positionnement, l’impression et le post-traitement) et les cinq étapes, plus longues et plus complexes, du procédé d’impression de céramiques : la sélection d’une poudre aux propriétés adéquates, la réalisation d’un feed stock, l’impression, le nettoyage, le déliantage (élimination de la phase organique) et le frittage (consolidation de la pièce). Il a insisté sur le fait que la poudre intervient à différents niveaux dans le processus de fabrication. L’homogénéité des couches est très importante et une série de paramètres est à contrôler avant d’utiliser une poudre pour atteindre l’objectif d’un implant, toujours en regard de son « cahier des charges ».
Frédéric Boschini a ensuite fait le point sur le marché des imprimantes céramiques et présenté en détails, avec leurs avantages et inconvénients respectifs, les 3 technologies d’impression :
- l’impression par dépôt de fil fondu ;
- l’impression par jet de liant (binder jetting);
- l’impression par stéréolithographie.
La stéréolithographie est la technologie idéale pour l’impression d’implants. Néanmoins, le traitement thermique de ces derniers, en vue du déliantage et du frittage, prend beaucoup de temps, ce qui induit un besoin de développer et d’investiguer de nouvelles méthodes pour cette étape.
Frédéric Boschini a conclu en remerciant ses partenaires et co-financeurs du projet Powdprint qui a permis des avancées significatives, dont le développement d’outils prédictifs, la minimisation des rebus, la robustesse du procédé...
Grégory Nolens, docteur en sciences biomédicales de l’Université de Liège et fondateur de la PME wallonne Cerhum, a ensuite présenté MyBone, implant aux propriétés qui en font une véritable innovation dans le domaine médical.
Cerhum, fondée en 2015, est spécialisée dans la fabrication de dispositifs médicaux servant à la reconstruction osseuse et fabrique des implants en biocéramique, une matière dont la composition est très proche de celle des os du corps humain. Elle se focalise sur le domaine maxillo-facial et se différencie d’autres entreprises du milieu par l’impression en 3D de ses implants.
Partant d’une volonté d’améliorer la vie des patients en leur évitant une auto greffe osseuse, Cerhum a développé, il y a 4 ans, le greffon MyBone, composé à 100% de hydroxyapatite (HAP), le composant principal de l’os. Imprimé en 3D et offrant une porosité contrôlée et des pores interconnectés, ce greffon innovant a été étudié pour permettre au corps du patient de le coloniser avec des cellules et des vaisseaux sanguins. Cela signifie qu’après implantation, ces matrices se colonisent et créent de l'os naturel, vivant et fonctionnel.
Ce produit certifié offre de nombreuses applications mais la première consiste à proposer un greffon sur mesure pour chaque patient, ce qui favorise la reconstruction osseuse, indépendamment des traitements que le patient subit. Par rapport à un greffon artificiel classique, la reconstruction est 5 à 7 fois plus rapide.
Grégory Nolens a expliqué, de façon vulgarisée, les aspects précliniques et cliniques de la reconstruction osseuse avec des solutions conventionnelles vs l’utilisation de MyBone et a donné des exemples de cas cliniques, dont celui de la reconstruction récente, avec le CHU de Toulouse, de l’intégralité du nez d’une patiente.
Une prochaine étape de développement est de créer, en collaboration avec des chirurgiens, un greffon MyBone vascularisé. En effet, dans le cas pré-cité, le greffon avait été implanté dans l’avant-bras de la patiente le temps qu’il se vascularise, avant la greffe et la reconnexion aux vaisseaux sanguins pour reconstruction.
Le greffon sur mesure MyBone reste un marché de niche, avec un produit à très haute valeur ajoutée. La société Cerhum a donc des perspectives de développement en cours, sur le marché américain, pour une production en masse dans des secteurs comme l’orthopédie ou le rachi. Elle collabore également avec la faculté de Médecine Vétérinaire pour fournir un support pour des cellules souches, ce qui offre un potentiel pour la reconstruction plus rapide et le testing in vitro pour certains médicaments.
Retrouvez ci-dessous les présentations de cette rencontre :
Imprimer de l'os en 3D : de la matière au patient from LIEGE CREATIVEAnnonce
Le concept fictionnel de la fabrication de tissus humains se rapproche peu à peu de la réalité. Ainsi, il est aujourd'hui possible de créer des matrices osseuses à façon par impression 3D. La conception d’implants chirurgicaux biocompatibles « sur mesure » entre dans le cadre du développement de la médecine personnalisée pour répondre aux besoins de patients nécessitant une greffe osseuse. Après implantation, ces matrices se colonisent et créent de l'os naturel, vivant et fonctionnel.
Le projet PowdPrint, débuté en septembre 2019, est issu d’un appel WALInnov dans le cadre du « Plan Marshall 4.0 ». Il est le fruit de la collaboration entre le groupe de recherche universitaire ULiège-GreenMAT et la PME wallonne Cerhum, spécialisée dans la réalisation de produits complexes et innovants fabriqués par impression 3D. Cette PME, fondée en octobre 2015, a pour domaine d'activités principal l'impression en 3D de pièces en biocéramiques principalement pour une application biomédicale.
Grégory Nolens (Directeur Général et CSO de Cerhum) et Frédéric Boschini (responsable R&D poudres au sein du laboratoire GreenMAT-ULiège) vous exposeront les résultats thérapeutiques des matrices MyBone de Cerhum, ainsi que les coulisses de son développement effectué en collaboration avec le GreenMAT au travers du projet PowdPrint.
Cette rencontre-conférence permettra également de découvrir la plus-value de l'ingénierie des poudres au service de l'industrie biopharmaceutique.