Orateur(s)
Jean-Marc Lambotte Coordinateur Scientifique (Faculté des Sciences, Lepur, Sphères, ULiège)
Georgios Maillis Bouwmeester (Ville de Charleroi)

Comment minimiser la dépendance à la voiture via l'aménagement du territoire ?

    Résumé

    Jean-Marc Lambotte, Coordinateur Scientifique (Faculté des Sciences, Lepur, ULiège), a tout d’abord rappelé le contexte belge de l’utilisation de la voiture dans nos principaux déplacements. Depuis 2005, l’usage de la voiture régresse en Flandre et à Bruxelles mais progresse en Wallonie où sa part est très dominante. On remarque que les populations aisées ont un nombre de voiture supérieur par ménage à l’inverse des populations moins favorisées.

    C’est d’ailleurs à Bruxelles, où la densité d’urbanisation est élevée que l’on retrouve le plus bas pourcentage.

    Historiquement, l’évolution des formes urbaines était liée aux modes de déplacement dominants.
    On peut retrouver trois types de villes qui se sont succédés :

    1. Ville piétonne traditionnelle (haute densité, multifonctionnalité, structure organique)
    2. Ville Transports en commun (densité moyenne, multifonctionnalité, forte centralisation)
    3. Ville voiture (faible densité, mono fonctionnalité et zonage, faible centralisation)

    C’est à l’époque de la ville voiture que l’on voit naître l’émergence de l’étalement urbain. C’est d’ailleurs la mise en œuvre d’un Plan de secteur qui a permis de le favoriser ou de le restreindre selon les localités. La ville apparait donc aujourd’hui comme la juxtaposition de zones monofonctionnelles entre lesquelles on circule.

    Le volume des disponibilités foncières dans les zones urbanisables (en particulier dans les zones d’habitat) reste aujourd’hui très forte dans une large partie du territoire wallon.

    C’est grâce à des villes comme Maastricht ou le Sud du Limbourg néerlandais que nous avons des exemples concrets de cas pratiques pour minimiser la dépendance à la voiture. Ces villes relocalisent leurs différentes fonctions en créant des quartiers compacts (de 120 à 150 m2/logement). Par ailleurs, en Allemagne, à Münster et Karlsruhe (et à Aachen, dans une moindre mesure), une politique des courtes distances est mise en place pour rendre la ville plus durable.

    Après avoir abordé la question pour les centres-villes, Monsieur Lambotte a évoqué la dépendance à la voiture en milieu rural et périurbain et comment la minimiser.
    Il s’agira de concentrer l’habitat (et les services à la population de proximité de type libre-service alimentaire, pharmacie, école primaire et maternelle...) dans les principaux villages et quartiers périurbains disposant d’une masse critique suffisante pour assurer :
    - la pérennité de ces services ;
    - un recours significatif aux alternatives à la voiture dans une logique de village (et quartiers de ville) à 10 minutes.
    C’est un axe majeur du projet de schéma de développement territorial.

    Il est aussi nécessaire que les milieux ruraux et périurbains reviennent à des densités résidentielles plus durables en s’inspirant des typologies bâties d’avant 1950.

    Georgios Maïllis, Bouwmeester de la Ville de Charleroi, nous a ensuite présenté le Plan d’intensification urbaine pour concentrer les développements urbains sur des axes partant du centre-ville et autour de plusieurs polarités.

    Suite à la construction du ring en 1960 et des fonctions morcelées du cœur de la ville, il était indispensable de revaloriser le centre-ville avec un pôle commerciale inexistant actuellement.

    La ville de Charleroi est une ville en forme d’étoile avec différents centres qui se sont développés en périphéries (Gosselies, Marchienne-aux-ponts, …), comment faire donc pour relier les différentes communes aux différents centres ?

    1. Investir dans les axes densifiés grâce à des Transports en commun efficaces
    2. Reconnecter les espaces verts entre eux pour y limiter l’urbanisation
    3. Connecter les différents centres grâce à des lignes de bus à haut niveau de service 

    Tous les nouveaux projets, pour être bien accueillis, doivent s’inscrire dans ce schéma de ville polycentrée. À terme, l’idée sera de :

    • retrouver en centres–villes les grandes fonctions métropolitaines, ainsi que le siège de certaines entreprises structurantes pour y ancrer l’emploi ;
    • retrouver un pôle culturel rénové, où l’offre culturelle sera abondante ;
    • valoriser le campus U Charleroi comme un pôle d’activités fort et emblématique dans le domaine de l’enseignement supérieur et universitaire, de la formation, de la recherche scientifique, de la diffusion de la culture scientifique ainsi que de la sensibilisation aux métiers scientifiques et techniques.

    En effet, il est très important de rendre nos villes plus attractives avec une politique urbaine forte. Le Bouwmeester de Charleroi a conclu en disant qu’il n’avait peut-être pas le pouvoir mais bien de la conviction !

    D'ici 2050, les émissions de gaz à effet de serre sont appelées à être réduites drastiquement pour éviter de trop conséquents bouleversements climatiques. Le transport des personnes et marchandises est l'un des secteurs où les tendances en cours, à cet égard, sont très éloignées des objectifs auxquels nous allons devoir très rapidement nous astreindre. À côté de solutions techniques comme les voitures électriques, il convient de réduire fortement nos besoins de déplacements quotidiens. C'est notamment via l'aménagement du territoire qu'il est possible, sur le long terme, de minimiser ceux-ci et la dépendance à la voiture qui y est associée.

    Lors de cette rencontre-conférence, Jean-Marc Lambotte (Lepur-ULiège) soulignera les liens historiques entre l'évolution des formes d'urbanisation et les comportements de mobilité. Il mettra en avant plusieurs solutions complémentaires en vue de minimiser cette dépendance à la voiture, en localisant au mieux les différentes fonctions entre lesquelles nous circulons au quotidien. Il nous expliquera également comment elles peuvent être implémentées dans les milieux ruraux et périurbains.

    Georgios Maillis (Bouwmeester de la Ville de Charleroi) présentera, en guise d'exemple, le Plan d’intensification urbaine qu'il propose en vue de concentrer les développements urbains sur certains axes partant du centre-ville et autour de plusieurs polarités.